6 février 2022

Action et actualité locales

Remplacement : initiatives tout azimut et risques de dénaturation de nos métiers !

Remplacement : initiatives tout azimut et risques de dénaturation de nos (...)

Le contexte sanitaire impacte lourdement le système éducatif, et particulièrement dans notre académie. Faute d’un protocole réellement protecteur dans les collèges et les lycées, les absences pour Covid se multiplient. Ce 4 février, pour la seconde semaine consécutive, notre académie se distingue par un taux de personnels absents qui dépasse les 10% des effectifs totaux. Et leur remplacement n’est le plus souvent pas assuré, ce qui pousse recteur et établissements à multiplier les initiatives, parfois tout azimut, pas toujours pour le meilleur.

Des établissements qui postent leurs affiches “maison”, avec une maladresse parfois touchante d’envie de bien faire, mais qui trahissent aussi une situation des plus difficiles, ou en détournant de célèbres campagnes d’enrôlement venues d’outre-atlantique ; un recteur qui “innove” - faute de mieux - avec des propositions qu’on retrouve aussi dans d’autres académies … Le constat est clairement visible : les restrictions budgétaires des dernières années ont complètement laminé un système de remplacement sacrifié sur l’autel de la réduction des postes. La débrouille devient la norme, mais elle menace aussi quelques certitudes sur le métier d’enseignant, balayant les garanties statutaires et les inconvénients pédagogiques.

Ainsi, pris par l’urgence, le rectorat n’a guère d’autre choix que de faire appel à la précarité, à toujours plus de précarité, pour tenter de masquer la misère : après le vibrant appel du recteur aux bonnes volontés en décembre dernier sur les ondes d’une radio régionale, après l’échec prévisible de l’appel aux retraités, le recteur recrute toujours plus de contractuels. ... s’il s’en trouve !

Et comme il n’en trouve pas, il abaisse l’exigence de qualification : désormais, on recrute des professeurs à Bac+2, au moins durant la crise sanitaire, au lieu du niveau réglementaire du Bac+3 minimum pour les contractuels, et Bac+5 pour les titulaires. Si cela élargit peut-être ponctuellement le vivier - cela reste à démontrer -, cela limite la garantie apportée par la détention d’un diplôme de niveau au moins Licence à la qualité des candidatures : peut-on sérieusement envisager de recruter des professeurs, même précaires, à un niveau à peine plus élevé que celui où ils devront intervenir et assurer des cours ?

Et comme cela ne suffit toujours pas, il invente le remplacement « à distance », en visio-conférence : le collègue est chez lui devant son écran, tandis qu’un AED assure une présence adulte dans la classe ! Après J.M. Blanquer décidant du protocole sanitaire depuis Ibiza (avec le succès que l’on sait …), le rectorat de Toulouse institutionnalise l’enseignement à distance comme pis-aller, dont les confinements passés ont bien montré les limites en termes pédagogiques. Il oublie là que l’activité d’enseignement ne se résume plus, depuis longtemps, à la lecture d’un cours auquel les élèves assistent comme à un spectacle ! Enseigner à distance est un acte pédagogique fort différent de l’enseignement en présentiel, qui demande des compétences particulières, auxquelles les collègues n’ont pas été préparés. Sans oublier que ces visio-cours mobilisent des AED, déjà surchargés de tâches et en nombre très insuffisants, pour surveiller les classes prises en charge et assurer leur sécurité, sans possibilité d’intervention physique de l’enseignant cantonné à son écran.

Bref, cette modalité n’est en rien une modalité opérante au plan pédagogique, mais qu’importe, la presse y a cru, et peut-être quelques parents d’élèves… Toujours communiquer, surtout pour masquer l’impréparation désormais coutumière du ministre et les effets désastreux de ces choix pédagogiques ; à tel point que c’est par la presse que le SNES-FSU Toulouse a appris les grandes lignes de ces annonces. Si le ruissellement fonctionne, ce n’est hélas que pour répandre les mauvaises habitudes du ministre !

Le SNES-FSU veillera en tout cas à ce que ces dispositions restent très transitoires, et ne deviennent pas la norme au-delà de la crise sanitaire. Il dénonce le fait que le remplacement n’est aujourd’hui envisagé que par du bricolage pédagogique et la précarité. Si le remplacement est aujourd’hui en si grande difficulté, c’est du fait de l’insuffisance de ces moyens de remplacement et du budget qui lui est consacré (aussi bien en postes qu’en possibilités budgétaires de rétribution (rappelons qu’il y avait eu des suppressions massives de Titulaires sur Zone de Remplacement depuis des années) : la suppression de 7.900 postes dans le Second degré depuis 2017 n’y est pas pour rien !
Certes, le rectorat avance comme argument la création de 39 équivalent temps-plein à la rentrée 2022 sur des missions de remplacement, ou des avancées, qui restent à préciser et concrétiser pour les contractuels. Si le SNES-FSU accueille favorablement le principe, il demande que tout soit fait pour ne pas se retrouver dans une situation de non-consommation de ces moyens par manque de personnels recrutés, et que ce moyens ne soient pas une porte ouverte au développement d’une plus grande précarité. Il rappelle ainsi son attachement aux concours, adaptés si nécessaire aux parcours des contractuels, comme modalité de recrutement des personnels du Second degré, et à l’emploi de personnels titulaires, y compris sur les missions de remplacement. Cela a évidement un coût, mais qui a chiffré le coût, pour les élèves, d’une scolarité hachée ?
Il pose enfin très clairement la question de l’attractivité de nos métiers, qui reste toujours un impensé du ministre : la question des rémunérations et des conditions de travail est centrale, et constitue bien l’une des clefs fondamentales pour assurer aux élèves une continuité pédagogique de qualité en temps de crises sanitaire, et au-delà.