PIX : faire le point et agir

A cette rentrée, le dispositif de certification des compétences numériques des élèves évolue.

Cette nouvelle certification prend le relais et étend le B2I, qui a été supprimé et remplacé, depuis la rentrée 2019, par le CRCN (Cadre de Référence des Compétences Numériques), qui ne peut être validé que par la plate-forme PIX, partie visible du Groupement d’Intérêt Public regroupant Ministère de l’éducation nationale, Ministère de l’enseignement supérieur, Université de Strasbourg, CNED, CNAM, Université Ouverte des Humanités, chargé de la mettre en oeuvre.

Le plus souvent passée sous silence, la certification PIX, obligatoire en fin de cycle 4 et de cycle terminal va, malgré toutes les incertitudes pesant sur cette année, entrer en vigueur, au cours de l’année scolaire 2020/21. C’est au détour d’une simple phrase passée relativement inaperçue dans la circulaire de rentrée, que le Ministère a décidé qu’il y avait urgence à généraliser un dispositif largement inconnu des praticiens de terrain : jetés dans le bain avec un minimum d’informations - et beaucoup d’injonctions - les collègues vont devoir s’exécuter, au garde-à-vous comme s’ils n’avaient que cela à faire dès ce début d’année.

Une certification qui s’organise en plusieurs phases

Les grandes étapes sont ainsi censées êtres les suivantes selon la présentation officielle :

 Avant les vacances d’automne : les élèves et étudiants de tous les niveaux d’enseignement du lycée (LGT et LP) incluant CAP, BTS et CPGE réalisent sur PIX un parcours de positionnement de rentrée, adapté à chaque niveau d’enseignement. (A noter : les CPGE et classes post-baccalauréat sont aussi concernées par cette première étape, mais curieusement elles n’étaient pas mentionnées dans le calendrier lors de sa première publication).
Tous les élèves disposent en fin de parcours d’un aperçu de leurs compétences numériques, et « les enseignants identifient les besoins de formation à l’échelle individuelle et collective ».

 Durant l’année scolaire : Les équipes pédagogiques accompagnent les élèves dans l’acquisition de nouvelles compétences au travers de leurs enseignements disciplinaires. Ils peuvent leur proposer des tests PIX complémentaires en appui à leurs actions pédagogiques pour suivre les acquis et les préparer à la certification, dans le cadre ordinaire de la classe, et développer les compétences non déjà validées …

 La certification obligatoire devra se dérouler entre le 4 janvier et 5 mars 2021 (!) pour les Terminales et les élèves de 2e année de BTS et de CPGE ; entre le 8 mars et le 12 mai 2021 pour les élèves de Troisième...

En principe, chaque classe doit disposer d’un créneau de 2h - sous réserve que tous les élèves puissent rentrer ensemble dans une salle informatique - pour passer les tests de positionnement initial PIX et la certification.

Et concrètement cela donne quoi ?

Dans l’académie, le rectorat a décidé d’enclencher le processus, en mettant la pression sur les personnels de direction, qui se sont parfois souvent dépêchés de la mettre sur les équipes, les PP, les référents numériques, etc., en fonction des établissements : la machine à déléguer fonctionne à plein... Bref, une surcharge forte de travail, à un moment où aucune formation, aucune réelle information n’ont été communiquées aux équipes qui ont franchement d’autres priorités pédagogiques dans le cadre d’une rentrée difficile où ils ont à coeur d’accompagner au mieux les élèves en remédiant aux lacunes que le confinement n’a pas manqué de créer.

Cadrer les choses localement

La responsabilité de l’organisation de la certification incombe au chef d’établissement, qui en arrête les modalités pratiques et les met en oeuvre. Mais, particulièrement au lycée, il est important d’exiger que cette certification ne viennent pas désorganiser encore plus les enseignements dont la continuité va être mise à mal par le nouveau calendrier, par ailleurs déjà inacceptable du baccalauréat. Il est en outre hors de question que cela s’ajoute à la charge de travail des professeurs principaux.

Des collègues peuvent se voir demander de surveiller la passation des diverses étapes de la certification, mais cela doit se faire sur temps de classe ou, si cela est réalisé en dehors, donner lieu au versement d’HSE. Il convient en outre de veiller à répartir la charge de travail, qui ne peut reposer intégralement sur les professeurs documentalistes ou quelques AED, comme on a déjà pu le voir dans certains établissements de l’académie.

Problèmes de fond

Sur le fond, il s’agit une nouvelle fois d’une certification de compétences non strictement scolaire, qui se rajoute aux missions sans temps à y consacrer, ni formation prévue pour les personnels prévue (seul un document de présentation se trouve en ligne ; sur Eduscol, le ministère se contente de renvoyer les enseignants vers des fiches, contraignant les collègues à aller sur le site PIX et de s’y auto-former... sur leur temps libre !

La question se pose à nouveau du développement d’un dispositif qui a vocation à accompagner chaque individu tout au long de sa vie et à être inscrit au registre des compétences professionnelles (donc qui sera potentiellement exigible pour un emploi), sans être en rien rattaché à un quelconque diplôme, ni réelle obligation de financer le surcroît de formation qu’il demande : une manière renvoyer, une fois de plus, chaque individu à lui-même, et d’en faire « un acteur de sa propre réussite », au risque d’en supporter seul les échecs... C’est la même logique, que dénonce le SNES-FSU, qui conduit aux certifications (payantes) en langues vivantes, ou ailleurs, et qui finissent par dévaloriser les diplômes eux-mêmes en entretenant une forme de concurrence avec eux.