« Prenez votre cahier de texte ! » Plusieurs élèves ne bougent pas. « Ce sera sur l’ENT madame ? »
Qui n’a pas entendu cette question ou reçu un mail de parents demandant le cours pour leur enfant malade ? Alors dans le cadre des Groupes Métier, nous nous sommes interrogés sur le glissement de l’utilisation de ce fameux cahier de texte numérique et sur la culpabilité quand on n’a pas le temps de « bien le remplir ». Mais qu’est-ce que cela signifie au juste ?
Voici un petit extrait de nos échanges à ce sujet :
D : J’aimerais savoir, ce cahier de texte, à qui il s’adresse ?
X : À toi d’abord… Aux élèves… Aux parents ? Inspecteurs ?
D : Aux élèves oui, pour les devoirs ça va, mais moi c’est jamais détaillé.
Y : Quand un élève est absent, comment il rattrape ? Avec l’ENT ça marche ?
X : Je leur dis qu’ils y ont accès, certains récupèrent… Pas beaucoup.
D : Oui mais le parent qui croit y trouver le cours, faire un dessin par exemple, qu’est qu’ils en font les parents ? En classe je suis là, je montre, on discute… Tout ce qui se dit oralement, ça ne peut pas s’y retrouver dans le cahier de textes.
Quelqu’un rappelle alors la circulaire du 6 septembre 2010. Qui l’a lue ? Personne. Elle indique que le cahier de texte numérique est une référence au cahier de texte individuel, il reflète le cours et la progression, mentionne le contenu de séance et le travail effectué.
D : ça ne dit pas qu’il permet à un élève d’avoir le cours. Ce n’est pas un support de continuité pédagogique.
Ce rappel semble évident et pourtant, qui n’est pas tombé dans le piège de la confusion ENT / continuité pédagogique ces derniers mois ? Alors nous ressentons un soulagement après la lecture de cette circulaire.
Y : Quand je fais mon cours, que je le conçois, je n’intègre pas la contrainte de mettre tout sur le cahier de texte. Je me dis pas X et Y seront absents, il faut que je fasse un cours en fonction…
X : Moi je trouve que remplir le cahier de textes pour chaque heure de cours ça prend du temps, il faut être bien concentré, aller chercher le document à mettre en pièce jointe, surtout si tu ne sais plus où il est sur l’ordi…
D : Moi je ne le fais jamais en fin de séance, j’ai pas le temps.
C : C’est comme si c’était du temps volé, comme si c’était pas notre métier.
B : Oui, comme s’il fallait justifier notre travail, mais notre boulot c’est de faire cours, être là pour les élèves en classe, pendant le cours. Aller voir untel quand il regarde dans le vague pour lui réexpliquer…
T : Mon métier, c’est d’apprendre aux élèves à chanter, ça on peut pas l’apprendre par l’ENT !
Les échanges dans le groupe ont ainsi permis de prendre conscience de l’importance des interactions professeur / élèves, cette écoute de l’enseignant qui lui permet de réguler et les faire avancer… Ce qu’aucune fiche sur l’ENT ne peut faire en réalité.
Cet article est paru dans le Bulletin syndical du SNES-FSU Toulouse de décembre 2022.