La Commission Adminsitrative Académique du SNES Toulouse s’est réunie le 29 septembre 2020 pour débattre des conditions de rentrée à partir des remontées de terrain. Vous trouverez ci-dessous un certain nombre d’analyses qui serviront d’orientations aux interventions, actions,, mobilisations du SNES-FSU, quelle que soient les formes qu’elles prendront :


Texte adopté à la CAA du 29/09/20 – Toulouse

L’analyse des conditions de rentrée a été polarisée par les enjeux sanitaires qui appelaient évidemment des réponses rapides : la situation sanitaire mouvante impose en permanence une réaction du SNES et des collègues dans les EPLE et c’est pour cela que le SNES a mise en place et continue de déployer régulièrement des outils d’information aux collègues sur cette question spécifique. Il cherche par ailleurs à peser dans les instances et accompagnera les collègues qui se mobiliseraient sur ce sujet, tout en estimant que la responsabilité du ministre pourrait être engagée par ses choix en cas de nouvelle flambée de l’épidémie.
Pour autant, la continuité de l’action gouvernementale – et parfois son accélération – dans le droit fil des politiques libérales destructrices poursuivies depuis 3 ans, impose de dépasser les problématiques strictement sanitaires et d’urgence, qui offrent au pouvoir en place un paravent opportunément exploité pour promouvoir ses choix à l’encontre des fondamentaux des Services publics. La crise sanitaire, l’expérience du confinement, les conséquences économiques et sociales de cette crise, conduisent ainsi à l’impératif de construction d’un “monde d’après” qui marque une rupture nécessaire et urgente avec ces logiques libérales, celles-ci ayant montré plus encore à l’occasion de cette crise tous leurs effets délétères.
De ce point de vue, le SNES considère que sa responsabilité est de faire notamment ré-émerger dans le débat public les problématiques des Services Publics en général et de l’Éducation en particulier, grands oubliés du “plan de relance”, si ce n’est grands sacrifiés de ce plan.

Point de rentrée :

Situation sanitaire
La situation est chaotique, chaque établissement ayant développé localement des déclinaisons à géométrie variable du protocole sanitaire minimaliste du ministre. Les collègues n’ont le plus souvent pas obtenu de leur administration un nombre de masques leur permettant de couvrir la semaine (de 2 à 6 masques distribués au maximum).

Le SNES continue d’exiger que les personnels soient dotés, comme tous les salariés, par l’employeur, non pas de masques en tissu, mais de masques chirurgicaux, de masques dits “inclusifs”, ainsi que de micros amplificateurs quand les collègues en font la demande.

De nombreux collèges et lycées connaissent des situations de tension. Les protocoles sanitaires (notamment celui de la région) sont exigeants, et difficiles à mettre en œuvre en pratique quand le nombre d’Agents territoriaux n’est pas à la hauteur des besoins (dotation initiale et moyens de remplacement). Pour la FSU, il y a nécessité de dotations plus ambitieuses, et la crise sanitaire aurait dû être l’occasion d’un investissement massif dans le recrutement et la formation d’agents publics pour répondre aux nombreux besoins sociaux non satisfaits et améliorer l’accueil des élèves et étudiants. Le SNES avec la FSU dénonce le fait que :
 le nettoyage et la désinfection de certains espaces (internats, sanitaires, cdi, etc…) et salles de cours sont insuffisants (le planning de nettoyage ne pouvant être tenu, certains espaces ne sont pas nettoyés à la fréquence exigée) alors même qu’il y a là un enjeu sanitaire fort ;
 l’offre de repas se voit limitée (pas de choix de plats, repas froids, voire quantités limitées ou qualité à la baisse) alors même qu’il y a là aussi, en la période un enjeu social vis-à-vis d’un grand nombre de familles ;
 plus globalement, dans ce contexte de charge de travail alourdie, les difficultés se multiplient et avec elles une souffrance au travail, qui ne manquera pas d’aggraver la situation à travers un absentéisme, appelant des moyens de remplacement.

[…]

Le port du masque complique, comme pour l’ensemble des salariés, l’exercice professionnel. Mais l’obligation de son port ne peut servir de cache-misère ni de prétexte au refus de rechercher des solutions complémentaires ou de dégager des moyens comme cela a pu être fait dans d’autres secteurs. De ce point de vue, le SNES-FSU dénonce la non-anticipation depuis 6 mois d’une situation pourtant prévisible, et ce alors même que le SNES-FSU avait fait des propositions concrètes dès le mois de juillet, propositions qu’il continue de porter dans le contexte.

Sur le plan pédagogique, les absences tournantes des élèves rendent difficile le suivi sur tous les plans : mais la question de la continuité pédagogique est posée à l’initiative le plus souvent des chefs d’établissement qui donnent des injonctions à un suivi des élèves cumulant présentiel et distanciel. Le SNES-FSU rappelle que les ORS des enseignants limitent à 18h ou 15h le temps de travail devant élèves, et ne cadrent pas les missions liées, qui doivent rester à l’initiative des collègues. Les enseignants n’ont pas attendu les premières injonctions du ministre pour accompagner les élèves ponctuellement, ou parfois plus longuement, éloignés de l’école : pour autant, il rappelle, d’une part, que la charge de travail ne peut être alourdie au prétexte de la crise, et dénonce, d’autre part, l’illusion qui consisterait à penser qu’un cours ou des supports pédagogiques mis en ligne pourraient remplacer un cours en présentiel. La période de confinement a bien montré que c’était non seulement faux mais en plus très inégalitaire.

[…]

Effectifs / Moyens
Le recteur a annoncé 50.000 HSE dévolues au soutien des élèves en sortie de confinement. Il s’agit simplement des moyens non-consommés du printemps et qui correspondent en gros à 1h de soutien par classe et par semaine jusqu’à la mi-octobre. Malgré l’engagement des collègues dans les dispositifs Devoirs faits et d’AP ainsi ré-abondés, ce n’est pas à la hauteur des effets pédagogiques dramatiques de la période de confinement : des aménagements de programmes sur plusieurs années sont nécessaires, aussi bien en lycée où la réforme du lycée avait conduit à la mise en place de programmes qui ont été largement contestés, ou en collège où des écarts très importants sont relevés dès l’entrée en 6-ième.

La question des effectifs des classes ressurgit à la rentrée, mais même de manière plus marquée. Elle se pose d’autant plus que l’inclusion conduit très souvent à ce qu’au quotidien les effectifs théoriques soient dépassés. Des collèges se sont déjà mobilisés sur le dépassement des seuils de 30 élèves pourtant retenus par le rectorat. Le SNES-FSU continuera son travail systématique de dénonciation sur le sujet et de mobilisation : recensement des situations problématiques, médiatisation des mobilisations, etc…

Par ailleurs, il demeure urgent d’investir, dans le cadre d’un plan d’urgence pour d’Education, grande oubliée du plan de relance, des moyens nouveaux et conséquents :
• allègement général des effectifs, comme le SNES-FSU le revendique depuis longtemps et comme la situation sanitaire et pédagogique l’exige,
• recrutements massifs, qui sont la condition nécessaire pour ces allègements (des propositions sur les concours et le recrutement avaient été précisément faites au ministère par le SNES-FSU pour répondre dans un premier temps à cette demande)
• locaux adaptés supplémentaires pour accueillir pour ces effectifs réduits.lLes demandes portées par le SNES en juin conservent tout leur sens et confirment la pertinence des mandats exigeant un autre ambition pour l’EN en termes de budget. Ces demandes doivent faire l’objet de revendications claires et unifiantes (à partager avec les familles également).

Le SNES-FSU considère comme inadmissible l’absence de réponses à ces attentes concrètes et urgentes quand des moyens sont facilement réquisitionnés dans d’autres champs.

Effets des Réformes

Lycée
Au lycée, les effets de la réforme du lycée se poursuivent : problème de l’organisation toujours / offre de formation (options / EdS). Pour le grand oral, les formations proposées et limitées à quelques collègues par établissement chargés ensuite de porter la “bonne parole” sans rémunération ne sont pas acceptables : tous les collègues concernés doivent pouvoir être formés au niveau académique.

Le redoublement des élèves de Terminale devant recommencer une année dans le cadre de la réforme du lycée et du bac (programmes / épreuves) n’a pas été anticipé par le ministère : c’est un signe de mépris pour les élèves concernés qui vont se retrouver en difficulté cette année. Le SNES-FSU demande des moyens pour assurer un accompagnement spécifique de ces élèves.

En lycée, la question des “évaluations communes” qui remplacent les E3C en renforçant les logiques combattues l’année dernière (calendrier local, modalités locales, etc…) va être très rapidement posée concrètement aux collègues : le SNES fournira des outils d’analyse pour permettre le débat dans les établissements, avec les parents notamment. Pour le SNES-FSU, il est encore moins raisonnable aujourd’hui qu’hier, après une période de discontinuité pédagogique lourde, de maintenir ces épreuves en cours d’année. Le SNES appelle à faire voter des motions dans le cadre des premiers CA (le SNES Toulouse fournira un modèle).

Des difficultés se font jour pour trouver des PP (refus de collègues, plus massifs que par le passé), avec localement, et en remplacement, des expérimentations de PP et des professeurs “référents” dans le cadre de la réforme du lycée (suivi individualisé, proposé aux professeurs d’EDS sur 2 ans, …).

L’arrivée de PIX au lycée a beaucoup surpris les collègues, qui n’ont pas été informés ni formés à ce nouveau dispositif : les collègues découvrent ainsi cette certification, dont le principe même pose problème, et la mise en oeuvre (préparation, passation, etc…) n’est pour le moment aucunement cadrée, ce qui provoque incompréhension.

Paritarisme attaqué :

[…]
Le SNES a, dès le projet de loi de transformation de la Fonction publique, largement dénoncé les dangers de cette attaque contre le paritarisme, et les dérives identifiées ont été pointées auprès de la profession

Le SNES continuera quoi qu’il en soit à dénoncer tout ce qui met à mal transparence de gestion et cadre de gestion collectif assurant l’équité de traitement et communique en ce sens auprès de la profession en soulignant qu’il en va d’un projet de société à travers la vision de la Fonction publique .

[…]

Etats généraux du numérique :
Dans l’académie, le choix a été fait d’une déclinaison départementale et inter-degré, avant un temps académique, également inter-degré. Les modalités concrètes d’organisation au niveau départemental (composition des tables rondes, organisations syndicales pas toujours invités ès qualité, faible publicité) laisse entrevoir qu’il sera difficile d’échapper au pilotage par des experts auto-désignés des questions du numérique éducatif et dès lors à un discours convenu sur la modernité numérique.
Le risque est donc grand que la parole critique des personnels soit occultée sur de nombreux enjeux, et que les élus et parents qui y sont invités n’entendent ainsi qu’une parole institutionnelle lénifiante marginalisant les analyses pédagogiques au nom d’une modernité insuffisamment questionnée. Au-delà, on connaît les dérives mercantiles déjà à l’oeuvre et ces états généraux apparaissent très clairement comme une opportunité pour ouvrir davantage encore l’EN à l’EdTech, avec les risques de privatisations rampantes et de mise en concurrence entre Service Public et offre privée.

Le SNES-FSU fera entendre une autre voix, et portera la réalité du bilan de la période de confinement, à savoir un échec pédagogique massif, et le creusement spectaculaire, en deux ou trois mois seulement, des inégalités scolaires. La question du matériel ne doit pas être la principale entrée de ces débats, il s’agit de porter la question des effets négatifs de la relation pédagogique à distance et d’une numérisation incontrôlée, qui nient l’expertise pédagogique des enseignants tout en creusant les inégalités scolaires.

Etats généraux de l’EP :
Face au risque d’une nouvelle remise en cause d’une politique volontariste de l’Education prioritaire, la FSU a souhaité donner la parole aux acteurs de terrain pour élaborer de nouvelles perspectives. La CAA appelle donc l’ensemble des militants à s’impliquer dans les états généraux susceptibles d’être organisés à l’automne 2020, dans les réseaux, les départements ou les académies. Pour rappel, en janvier 2021, un rendez-vous national des délégués devrait avoir lieu.
Le SNES Toulouse diffusera plus spécifiquement les outils de débats dans les établissements de l’académie relevant de l’EP.

Orientation :
La menace de la disparition de plusieurs CIO plane toujours dans notre académie, de même que celle de l’accaparement de tout ou partie des missions des PsyEN, ou leur dévoiement, par la Région. La mise en place d’un salon Parcoursup entièrement sous forme numérique, rendue nécessaire par la situation sanitaire, constitue une expérimentation grandeur nature d’évolutions ultérieures que le SNES refuse : transferts de missions vers les professeurs, relégation des élèves à eux-mêmes, rupture du lien interpersonnel indispensable pour les élèves les plus fragiles, etc.

Le SNES-FSU dénonce une offensive sur des associations proposants des interventions aux marges des établissements sur la question de l’orientation, du coaching scolaire, ou qui proposent des mallettes pédagogiques qui peuvent poser problème en termes de neutralité commerciale du Service Public.

Retraités :

Les retraités et personnes âgées ont payé un lourd tribut à la crise sanitaire (80 % des décès). Maintenant, ils sont dans le collimateur du gouvernement : sous prétexte qu’ils n’ont pas perdu de revenu contrairement à celles et ceux qui n’ont plus d’emploi ou sont mis en chômage partiel, il serait « juste » de leur demander une participation au redressement du pays. Il est envisagé de « sous-revaloriser » leurs pensions, voire de les geler alors que le gouvernement distribue des milliards aux entreprises sans contreparties, refuse de rétablir l’ISF etc. Avec une pension moyenne de 1472 euros bruts (75 % des retraité.es ont une pension inférieure à 2067 euros), les retraités ne sont pas des nantis. La réponse pour les salariés et les retraités est dans une meilleure répartition des richesses et une réforme fiscale juste.
L’absence d’un ministère dédié confirme la faible place accordée aux retraités dans la société. Pourtant, ces derniers ne sont pas des assistés et n’ont pas vocation à vivre reclus. Le SNES-FSU exige la reconnaissance des retraités comme des citoyens qui contribuent à la croissance et aux liens sociaux. Les retraités (pas plus que les actifs) n’ont à payer la crise sanitaire. Ils exigent le respect des engagements pris en termes de revalorisation des pensions et le retour à leur indexation sur les salaires. Ils s’opposent aussi à ce que les assurances complémentaires de santé reportent sur les assurés une cotisation supplémentaire.

Solidarité intergénérationnelle : Autonomie et Sécurité Sociale

La crise sanitaire a révélé aussi la discrimination envers les retraités, notamment les personnes âgées en perte d’autonomie, confirmant tragiquement les graves insuffisances d’une politique publique de santé et l’urgence d’une loi ambitieuse sur l’autonomie. Celle-ci est incessamment reportée, confirmant le refus des gouvernements successifs de répondre aux enjeux en décidant d’un financement public, solidaire, conséquent dans le cadre d’un service public et en renvoyant aux opérateurs privés et à la responsabilité individuelle.
Le gouvernement a fait paraître au JO du 08/08/20 deux décrets relatifs à la dette sociale et à l’autonomie qui valident entre autre « la création d’une 5e branche » avec inscription dans le PLFSS 2021 de mesures financières à hauteur de un milliard d’euros. Cette 5e branche s’inscrit à côté de celles qui existent déjà au sein de la Sécurité sociale, créant une confusion délibérée. Le rapport de Laurent Vachey sur son financement préconise, entre autres, de relever de 8,3% à 9,2% le taux de prélèvement de la CSG pour les retraités « aisés », d’augmenter la part de CSG non déductible dans les pensions, de réduire le plafond de l’abattement de 10% de l’impôt sur le revenu des retraités. Avec un financement ouvert aux assurances, elle serait gérée par la CNSA dont la composition s’éloigne fortement de la représentation paritaire.
Le SNES-FSU réfute une telle conception : la perte d’autonomie est un aléa de la vie et doit être prise en charge à 100 % par la branche maladie de la Sécurité sociale.
Il est en outre inadmissible de faire payer par la Sécurité sociale le coût de la crise sanitaire ; elle se voit ainsi de plus en plus fragilisée. Le combat pour les principes fondamentaux pour la Sécurité Sociale est un combat commun à tous les salariés, actifs et retraités.