17 novembre 2017

Métiers - Politique académique

Réforme du lycée, du bac, de l’affectation dans le supérieur : le SNES-FSU décrypte !

Réforme du lycée, du bac, de l'affectation dans le supérieur : le (…)

La réforme des affectation post-bac ? de l’orientation en terminale ? Ou comment les problèmes réels liés à APB ont été instrumentalisés... !

1. Si si, en pratique, c’est bien de sélection dont il s’agit... !

La mise en place d’une possibilité de sélection pour l’accès à toutes les filières de l’enseignement supérieur qui met en place le gouvernement change considérablement le contexte pour les poursuites d’études de nos élèves. Associée à la régulation des capacités d’accueil par les autorités académiques, dans un contexte de très grandes difficultés financières pour les Universités, et la mise en place de quota nationaux impératifs pour l’accueil en IUT et STS des bacheliers technologiques et professionnels, le dispositif qui se déploie est porteur d’évolutions très lourde sur le lycée, et fait craindre le développement de fractures encore plus importantes qu’aujourd’hui entre les différents types de lycéens, avec des cursus de plus en plus « tubulaires » (les choix d’orientation au lycée conditionnant de façon quasi mécanique un type de poursuite d’étude).

Le SNES et la FSU ont déposé des amendements à la loi, visant à rétablir explicitement le droit de tout bachelier à s’inscrire dans la filière universitaire de son choix. Ces amendements ont reçu un avis favorable de l’instance, mais n’ont pas été retenus par l’administration. Le SNES et la FSU se sont prononcés contre le projet de loi, qui a reçu un avis (consultatif) défavorable du CSE..

Retrouvez la déclaration FSU au Conseil Supérieur de l’Education (CSE) du 9 novembre.

Car malgré tous les discours, c’est bien de sélection systématisée dont il s’agit... ce que formule bien la proposition de modification de la loi :
« Les capacités d’accueil des formations de premier cycle de l’enseignement supérieur des établissements relevant du ministre chargé de l’éducation nationale et du ministre chargé de l’enseignement supérieur sont arrêtées chaque année par l’autorité académique après proposition de l’établissement. Lorsque l’effectif des candidatures excède les capacités d’accueil d’une formation, les inscriptions sont prononcées par le président ou directeur de l’établissement dans la limite des capacités d’accueil, après vérification de la cohérence entre, d’une part, le projet de formation du candidat, les acquis de sa formation initiale ou ses compétences et, d’autre part, les caractéristiques de la formation »

Certains dispositifs prévus – pour mieux faire accepter cette sélection – sont particulièrement pervers : par exemple la possibilité d’imposer aux nouveaux étudiant le suivi d’un cursus spécifique et comportant des renforcements disciplinaires peut paraître nécessaire et même généreux. Il est pourtant à questionner, en regard de l’absence de moyens pour l’assurer (la modification de la loi envisagée ne prévoit pas d’obligation de mise en place de ces dispositifs), et de la réalité de la situation sociale des étudiants aujourd’hui (plus de 50% travaillent pour financer leurs études). Au tri sur des critères scolaires et universitaires risque de se superposer un tri social, ce dispositif d’accompagnement et de « mise à niveau » pouvant être vécu comme un obstacle supplémentaire par les élèves cumulant fragilités scolaires et fragilités sociales.

Quant aux « attendus », ils seront très vite le moyen de recruter un profil et de marginaliser et exclure les autres, quand les universités ne se contenteront pas tout simplement de classer les « candidatures » par les notes (les notes venant attester des « acquis de la formation initiale »)

2. De l’affectation à l’orientation : quand l’année de terminale change de fonction dans l’improvisation la plus complète !

C’est dans ce contexte que le processus d’orientation est modifié avec les conséquences suivantes :

- alourdissement de la charge de travail des professeurs principaux (et des autres)
 instauration ou renforcement d’une double forme de sélection à l’entrée de l’université :
→ par la « mise sous conditions de résultats scolaires » dans l’ensemble des formations universitaires
→ par le recrutement sur dossier scolaire dans les « licences à capacité d’accueil limitées »
 changement du statut du bac qui deviendrait en pratique un simple « diplôme de fin d’études », et non plus dans les faits le premier grade universitaire (puisqu’il n’est plus la condition nécessaire et suffisante pour l’inscription à l’université)


Retrouvez le nouveau calendrier de l’orientation, et les analyses détaillées du SNES.

Cette réforme est clairement pensée pour gérer des flux sans augmenter réellement les capacités d’accueil : dans ces conditions, il faut « réorienter », « dévier », « barrer la route » à certains « flux » par rapport à certaines formations.

Mais il y a tout lieu de penser qu’elle freinera en particulier les poursuites d’études des élèves et étudiants de classes populaires, et des élèves les plus fragiles.

Il n’y a aucune volonté de donner au système scolaire les moyens de faire réellement réussir les élèves, en leur permettant d’acquérir les connaissances et habitudes nécessaires à leur réussite dans le supérieur : il s’agit de dissuader, de barrer, de détourner, d’empêcher « trop » d’élèves de vouloir devenir étudiants à l’université.

Par ailleurs, l’urgence dans laquelle se prépare la phase d’orientation en Terminale cette année met en situation très difficile les élèves et leurs familles, dans des délais très serrés, avec une information incomplète, fluctuante et potentiellement génératrice d’effets incontrôlables. Il y a de quoi inquiéter tout le monde... sur le plan technique, comme sur le plan idéologique !

Ainsi, il y a rupture du contrat passé implicitement puisqu’il y a changement de règles en cours d’année pour nos élèves, et puisque les enseignants deviendraient des évaluateurs des demandes de toutes les orientations possibles, au lieu d’être des conseillers.

Vade-mecum qui présente le nouveau dispositif improvisé et la maquette de la nouvelle fiche de dialogue.

Exemple de fiche de dialogue d’orientation

Il est évident que ce nouveau dispositif d’accompagnement à l’orientation pose de nombreuses questions, et risque de conduire à un alourdissement de la charge de travail des professeurs principaux notamment, mais pas seulement de ces derniers !

3. Et le bac dans tout cela ?

Dans ce contexte, le bac est l’objet de nombreuses attaques, sur sa valeur, sa lourdeur, son coût, son efficacité à préparer aux études supérieures.

S’il est légitime de réfléchir au sens du bac, il est essentiel de le faire sur de bonnes bases et non pas dans le cadre d’un débat brouillé par des arguments faux, approximatifs, qui ne disent pas la réalité des choses. C’est en ce sens que le SNES a développé un « vrai / faux » pour lutter contre les idées reçues sur le bac.

Des consultations (il ne s’agit pas de concertation) viennent tout juste de commencer : elle se font avec pour arrière plan les annonces présidentielles et ministérielles autour de la réduction des épreuves terminales, recentrées sur certaines disciplines), l’évaluation des autres disciplines relevant du coup du contrôle continu. Rien n’est officiellement arrêté, mais il est aussi question de suppression possible des séries, pour aller vers un lycée de type modulaire (les élèves se construiraient des parcours, en choisissant des modules). Cette organisation modulaire, réclamée par certains, masque mal les différences de parcours, sans permettre de réelles réorientations : les cursus modulaires renforcent les inégalités sociales, certains élèves et familles maîtrisant les codes leur permettant de choisir les bonnes combinaisons de modules, les autres – souvent les élèves les moins favorisés – faisant des choix qui limiteront ensuite leur capacité à la poursuite d’étude.

Pour le SNES-FSU, le baccalauréat comme ensemble d’épreuves terminales a toujours sa pertinence... ce qui ne veut pas forcément dire qu’il ne doit pas connaître éventuellement des ajustements.

Donnez votre point de vue - c’est crucial ! - sur le baccalauréat en participant à l’enquête nationale du SNES.